Comac C919

La Chine veut casser le leadership de Boeing et Airbus dans l’aérien

janvier 6, 2025 Par Bizchine

La Chine défie Boeing et Airbus avec le C919 de Comac, visant des certifications internationales pour élargir sa part du marché aéronautique mondial.

Comac, le constructeur aéronautique chinois, s’attaque au duopole Boeing-Airbus avec son avion C919, conçu pour les routes moyen-courriers. En 2023, il a effectué son premier vol commercial et est désormais exploité par des compagnies chinoises majeures. La stratégie de Comac inclut l’expansion sur les marchés internationaux d’ici 2026, malgré les défis liés aux certifications et à la maintenance. Avec des besoins mondiaux estimés à 42 430 avions neufs d’ici 2043, le C919 pourrait offrir à la Chine une place dans le secteur aéronautique mondial tout en renforçant sa souveraineté industrielle.

Comac et le défi de la production locale

Le C919 est le fruit d’années d’investissements massifs. Subventionné par l’État, cet avion monocouloir vise à réduire la dépendance chinoise envers les importations d’avions étrangers. À ce jour, 16 unités ont été livrées à des compagnies nationales comme Air China et China Eastern Airlines. Cependant, les composants clés, comme les moteurs fabriqués par CFM International (un partenariat entre General Electric et Safran), restent importés, ce qui limite l’autonomie technologique.

Selon des estimations, Comac ambitionne de produire 11 C919 par mois d’ici 2040, soit près de 2 000 unités cumulées. Ces chiffres restent modestes comparés aux capacités d’Airbus et Boeing, qui livrent environ 60 à 70 avions mensuellement chacun. La stratégie de production de Comac repose sur une montée progressive en cadence tout en sécurisant des commandes nationales. Ce positionnement initial en tant que solution de substitution pour les compagnies chinoises soutient les objectifs d’autosuffisance industrielle.

Les certifications et les défis internationaux

L’accès aux marchés internationaux dépend de certifications strictes. En 2024, Comac a lancé des démarches pour obtenir une homologation auprès de l’Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne (EASA). Cependant, les critères de certification européens, parmi les plus rigoureux au monde, posent un défi de taille. L’obtention de la certification de la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis semble encore plus complexe, compte tenu des tensions géopolitiques.

Ces certifications sont cruciales pour accéder aux marchés de l’Asie du Sud-Est et d’autres régions. La société prévoit de desservir ces zones dès 2026, mais les experts estiment que des retards sont probables. L’absence de certifications freine également l’intérêt des compagnies étrangères. Selon des sources proches de TransNusa en Indonésie, les incertitudes autour du support technique et de la maintenance représentent un frein majeur à l’adoption du C919.

La concurrence sur le marché des monocouloirs

Le marché des monocouloirs, dominé par les Airbus A320 et Boeing 737, représente près de 80 % des nouveaux besoins en avions selon les prévisions d’Airbus pour 2043. Ces appareils sont essentiels pour les vols régionaux et court-courriers. En lançant le C919, Comac cible directement ce segment lucratif.

Cependant, la capacité de Comac à concurrencer Airbus et Boeing reste limitée. L’expertise en logistique mondiale et les réseaux de maintenance établis des géants occidentaux offrent un avantage décisif. Par exemple, Airbus dispose d’une usine en Chine pour l’assemblage des A320, renforçant sa présence locale. De plus, Boeing et Airbus ont des carnets de commandes bien remplis, avec plus de 12 000 avions en attente de livraison, contre une fraction pour Comac.

Comac C919

Les enjeux géopolitiques et les implications économiques

Le projet C919 s’inscrit dans une stratégie plus large visant à réduire la dépendance technologique et à accroître l’influence de la Chine dans des secteurs stratégiques. Cette ambition s’accompagne de défis géopolitiques. Les tensions entre les États-Unis et la Chine, notamment en matière de restrictions technologiques, menacent l’approvisionnement en composants critiques pour le C919. Une administration américaine hostile pourrait limiter l’accès de Comac aux systèmes occidentaux.

En parallèle, le développement de nouveaux modèles comme le C929, un avion long-courrier visant à concurrencer le Boeing 787 et l’Airbus A350, démontre la volonté de Comac de s’imposer sur tous les segments du marché aéronautique. Cependant, ce projet dépend encore fortement des moteurs et systèmes occidentaux, ce qui pourrait retarder sa mise en service au-delà de 2040.

Les perspectives pour l’industrie aéronautique chinoise

À court terme, le rôle de Comac restera principalement axé sur le marché domestique. Les commandes massives des compagnies chinoises, soutenues par des politiques étatiques, permettront d’assurer un flux de production stable. Sur le long terme, le succès international de Comac dépendra de sa capacité à répondre aux normes internationales, à établir des réseaux de maintenance fiables et à surmonter les dépendances technologiques.

Pour les marchés internationaux, l’arrivée d’un troisième acteur pourrait intensifier la concurrence, offrant potentiellement des options alternatives aux compagnies aériennes. Toutefois, l’absence de maturité de Comac dans la chaîne d’approvisionnement et les services après-vente limitera ses parts de marché à l’échelle mondiale pour au moins une décennie.

Le C919 de Comac symbolise l’ambition de la Chine de s’affranchir de la domination aéronautique occidentale tout en renforçant son industrie locale. Bien que les défis soient nombreux, ce projet constitue une étape significative dans la stratégie économique et géopolitique chinoise. L’évolution de Comac, à travers le C919 et le futur C929, déterminera si la Chine peut réellement s’imposer comme un acteur majeur de l’aviation mondiale.